Chapitre 389
Alfred souhaitait s'inscrire dès l'ouverture des inscriptions, les cartes étant distribuées dès qu'une place se libérait. Trois combats en trois jours, un rythme que même un novice cherchant à se faire un nom aurait pu éviter. Pourtant, il ne montrait aucune fatigue. Rien dans son regard ne trahissait la moindre lassitude.
Le quatrième jour, au moment précis où le match commençait—
« Coincé, merde, style attentiste— »
Il fonça d'une traite, dans un éclair insaisissable. Pour ce quatrième jour consécutif, Alfred remporta la victoire d'un seul coup, un unique mouvement. Le public perdit toute retenue, tandis que les organisateurs se prenaient la tête à deux mains.
« Je peux attaquer ? »
« Vaincre Lushuan, c'est du sérieux. Si c'est au niveau des cartes ouvertes, ça passe. »
« Les chevaliers de la quête… On dirait une technique d'épée aussi irrationnelle qu'absurde. »
Il avait liquidé les trois équipes précédentes en un clin d'œil, et ce quatrième combat se solda par le même résultat, malgré la vigilance accrue de l'adversaire. Pour les spectateurs, c'était un spectacle inhabituel qui les comblait de joie, mais pour les organisateurs, c'était proche du pire scénario.
Le quatrième jour de sa carrière à Ulteriol, presque tous les parieurs misaient sur Alfred. Après les rumeurs concernant sa victoire contre Lushuan et les champions d'autres arènes, les bookmakers ne parvenaient plus à équilibrer les paris.
« T'es sûr ? C'est ton tour demain. »
« Laisse tomber, tu ne peux pas le battre. »
« Après avoir montré de quoi il est capable, même les Centaines auront du mal à l'utiliser. »
« On dirait pas qu'il est gladiateur. »
Comment gagner suffisamment pour s'imposer face à ses pairs ? Il ne comptait pas rester longtemps. Sa force était évidente. Après cela, il préparerait l'adversaire. C'était sa méthode.
« … Hé, apparemment, t'es fini ! »
Oui, c'était clairement de la provocation. Une déclaration d'intention visant à détruire ce territoire en utilisant l'arène comme tremplin. Dans ce cas, seul le roi pouvait intervenir.
Le roi de cette arène—
« On dirait que tu fais ce qui te plaît, espèce d'insecte égoïste. »
Lionel Giralde. Le roi apparut devant ceux qui n'atteindraient jamais son niveau. Un homme qui ne mettait les pieds dans l'arène qu'en jour de compétition.
« Hé, Lionel. On peut discuter un peu, tu veux bien ? »
« Oh ? »
Contre toute attente, c'est Alfred qui lança la conversation. Il l'attendait. Le roi viendrait en personne. Charlotte n'avait rien à voir ici.
« Je veux faire affaire avec toi. Allons ailleurs. »
« Un marché ne se conclut pas entre partenaires inégaux, tu sais ! »
Une accélération brutale, sans mouvement préparatoire. L'approche fulgurante tenait du prodige. Mais face à cela, Alfred sourit.
« J'ai vu ton mouvement avant. Montre-le-moi encore. »
Les yeux de Lionel s'écarquillèrent. Il avait entendu parler des trois derniers combats. Il venait de voir le précédent. Lionel savait qu'ils avaient été ridiculisés. Leur temps de réaction ne comptait plus. Malgré leurs charges, ils n'avaient pas pu réagir. Tous surpassés de loin. Un adversaire de calibre national.
« —Je te l'offre. »
Une épée se posa sur la gorge de Lionel. Avant même qu'il puisse réagir. Une humiliation insupportable, infligée devant tous.
Il avait été dominé en plein combat. Lionel s'était mépris. Un piège pour le pousser à sous-estimer son adversaire. Ça avait fonctionné. En situation réelle, tout serait déjà fini.
« Égalité. Maintenant, tu m'écoutes. »
« … Tu viens de perdre ta seule chance de gagner. »
Une rage froide. Mais cette colère ne visait pas Alfred. Elle était dirigée contre lui-même, tombé dans le piège.
« Tu ne me connais pas encore. Tu n'as pas vu mon vrai niveau. Donc tout va bien. »
« … Je te tue si tu dis des conneries. »
« Bien sûr. Je pense que ça servira. »
Lionel marcha en silence. Alfred comprit qu'il le suivait.
Les autres spectateurs—
« ……Ils sont sérieux ? »
Restèrent médusés devant l'affrontement.
○
« À mort ! »
Alfred se prépara au combat face à Lionel, visiblement furieux. Bien que prêts à en découdre, aucun ne bougeait imprudemment, connaissant la force de l'autre. Une pression supplémentaire, et Lionel passerait à l'attaque sans hésiter.
(Pas stupide, au fond. Plutôt du genre rusé.)
Son intelligence contrastait avec son comportement habituel. La preuve : il évitait les ennuis sérieux tout en tirant les ficelles. Dans ce monde, la force seule ne suffisait pas. Les idiots puissants mouraient jeunes. Lui, il comprenait l'essence des choses.
« Un duel direct, alors je te laisse le corps de Charlotte, espèce d'insecte ! Moi, je suis au sommet. Dans cette arène, c'est moi le plus occupé ! »
« Je sais, mais si tu me combats, ça changera. Tu ne veux pas perdre ? Je pensais que ton orgueil t'empêcherait d'accepter la défaite, peu importe les moyens. Cette affaire pourrait t'intéresser, car tu ne perdrais rien. »
« … Tu sais ce que j'aime, toi. »
« Si tu cherches la victoire pour elle-même, tu ne te contenterais pas de ce petit jardin. Il y a plus fort que toi dans ce pays. Mais tu préfères rester le roi de ce microcosme plutôt que de viser plus haut. »
« Je vais vraiment te tuer. »
Alfred avait touché un point sensible. Lionel était furieux, mais c'était une façade. Pourtant, cette fois, la colère était réelle. Une erreur, et il irait jusqu'au bout.
« Désolé si ça t'énerve, mais je n'ai rien d'autre à offrir. Je la veux, mais je n'ai pas d'autre monnaie d'échange. »
(… Ce type m'a sondé. Un scénario de Lydiane, sans instructions ? Pourquoi ce malaise ?)
Lionel sentit qu'Alfred avait percé quelque chose. Une intuition plus que de la logique. Et il s'y fiait.
(Je ne suis qu'un pantin qui danse ?)
Aucune directive de Lydiane. Donc, cela faisait partie du script.
« Quel genre de femme tu veux ? »
« Une belle pièce. Avec un peu de familiarité. »
(Je vois. Il parle de cette femme. Si une amie jolie avait entendu la situation, le scénario collerait.)
Ils étaient des marionnettes dansant dans la paume de l'autre, tout en s'observant. Lionel savait qu'il devait jouer le jeu. Parmi les options, celle-ci garantissait la victoire.
« Une connaissance ? Sans raison ? Le marché est caduc. Je suis trop occupé, tu sais— »
« Alors, faisons un pari. »
« Tu n'as rien à miser, toi ? »
« Je parie moi-même. Un duel contre toi. Si je gagne, je l'obtiens. Si je perds, tu me libères. Ça te va ? »
« Tu délires. Même pourrie, c'est la fille d'un noble, Seraphine. Une lignée prestigieuse. »
« Et si je te disais que je suis Alfred von Arcadia, premier prince du royaume d'Arcadia ? »
Lionel dévisagea Alfred, qui révélait son identité sans hésiter. Cet homme correspondait aux descriptions de Lydiane. Lionel recalcula ses options.
Pour accepter ce pari, Lionel devait croire en sa propre valeur. Il n'était ni stupide ni naïf. S'il croyait cette histoire invraisemblable, c'est qu'on l'avait préparé.
« Arrêtons les bêtises. À partir de maintenant, cartes sur table. J'ai traversé beaucoup de choses, mais je ne me laisserai pas manipuler. »
« Exact. Ton pari, les conditions me vont. C'est dans l'ordre. »
« Si je perds, je serais vendu à Lydiane ? »
« Tu feras ce que tu veux avant la vente. Même si tu es en pièces, l'État s'en moquera. Tu n'as pas peur depuis le début, non ? Il y a mille façons de souffrir sans mourir. »
« Oui, je sais. Mais je ne crains pas la torture. Ce qui m'effraie, c'est de devenir l'ennemi d'Arcadia en tant que jouet de Lydiane. Pire qu'un piège. »
Lionel réfléchit. Même en sachant qu'il était prince, il ignorait pourquoi il avait quitté son pays. Un fils prodigue ? L'atmosphère écartait cette option.
« Pourquoi ce pari ? Sans cette femme, tu as l'initiative. Pourquoi ne pas fuir avant de salir ton père ? »
Vraiment, pourquoi ce prince était-il ici ?
« C'est simple. Comme toi. »
Le prince d'Arcadia avait disparu. Rumeurs d'incompétence ? En le voyant, Lionel écarta cette idée. Plus probablement un fils prodigue parti de son plein gré.
Parce que—
« Je ne doute pas de ma victoire. C'est tout. »
Parce que cet homme était fort et brillant.
« Putain, je vais te tuer. »
« Oh, tout le monde. Je suis le champion. Et je m'ennuie ? Je vais jouer les clowns, organiser un match et montrer mes techniques. »
« Je te montrerai l'enfer à chaque coup. J'ai hâte. »
Deux sourires carnassiers. Chacun croyait en sa victoire. Même manipulés, ils décideraient de l'issue. Gagner ou perdre, c'était entre leurs mains. Et secrètement, ils avaient hâte d'affronter l'autre.
Rien ne valait un adversaire à sa mesure.
Ils l'avaient pressenti dès le début.