Chapter 144 32.10 - Mid-Terms
Chapitre 144 - 32.10 : Les Examens de mi-semestre
« Désolée pour le dérangement, petite. Mais tiens bon encore un peu, s'il te plaît. »
À peine ces mots prononcés, Sylvie ressentit une étrange sensation de légèreté, comme si elle s'envolait littéralement.
SWOOSH !
Un vertige soudain lui fit presque perdre la vue. Lorsque l'instructrice bondit en la portant sur son épaule, la vitesse déployée était si phénoménale que le vent lui cingla les paupières avec une violence inouïe.
Alors qu'elle était ballottée au rythme des enjambées de l'instructrice, l'esprit de Sylvie se noya dans un tourbillon de questions anxieuses. Une décharge d'adrénaline parcourut tout son corps tandis qu'elles traversaient les couloirs de l'académie à une allure vertigineuse, se dirigeant droit vers le donjon B-3.
La précipitation fébrile de l'instructrice et l'atmosphère de crise palpable lui glacèrent le sang.
Le souffle court et le cœur battant la chamade, Sylvie finit par rassembler assez de courage pour articuler une question. « Qu'est-ce qui se passe dans le donjon B-3 ? Pourquoi... pourquoi a-t-on besoin de moi là-bas, précisément ? »
La voix de l'instructrice vibrait d'une tension mal contenue lorsqu'elle répondit. « Nous avons détecté une activité anormale dans le donjon. Les perturbations énergétiques sont particulièrement inquiétantes. Plusieurs étudiants pourraient être en danger de mort à l'heure qu'il est. »
Ces mots firent immédiatement ressurgir en Sylvie le souvenir cuisant de l'expédition conjointe dans les donjons, lorsque les monstres étaient devenus incontrôlables.
Des vies d'étudiants avaient failli être perdues ce jour-là, une expérience traumatisante qu'elle n'aurait jamais souhaité revivre.
« Est-ce que cela signifie que... »
« Exact. Il pourrait s'agir d'êtres corrompus par des pactes démoniaques. Normalement, nous pourrions téléporter les blessés vers l'infirmerie, mais le donjon [B-3] présente des dysfonctionnements magiques. Aucune entrée ou sortie par téléportation n'est possible actuellement. »
Lorsqu'ils atteignirent enfin l'entrée du donjon B-3, le cœur de Sylvie cognait si fort qu'elle craignait qu'il ne brise sa cage thoracique, un mélange nauséeux de terreur et d'appréhension.
Mais avant que l'instructrice ne puisse franchir le seuil, leur arrivée fut saluée par une équipe de combattants expérimentés et de gardes en alerte maximum, déjà déployés sur zone.
« Instructrice Rachel. »
Le garde en faction reconnut instantanément l'instructrice et s'inclina respectueusement.
« Nous avons confirmation que plusieurs étudiants sont en situation critique. »
« Pouvez-vous les localiser avec précision ? »
« Affirmatif. Les systèmes GPS et de surveillance fonctionnent nominalement. Seules les téléportations spatiales sont perturbées. »
« État des lieux ? »
« Aucun décès à déplorer, mais un groupe d'étudiants est acculé par une horde monstrueuse. »
« Réserves de potions ? »
« Vous avez feu vert. Je ne veux aucun mort, c'est bien compris ? »
« Parfaitement clair. »
« Bien. »
SWOOSH !
Sans perdre une microseconde, l'instructrice s'élança comme une flèche vers la dernière position connue d'Astron Natusalune.
Le reste du personnel et des gardes emboîtèrent immédiatement le pas à leur supérieure.
Dès qu'elle pénétra dans le donjon, Sylvie sentit son estomac se rebeller violemment. Le fait d'être transportée à une vitesse supersonique dans une position inconfortable n'arrangeait rien à son malaise.
« Buerk ! »
Incapable de résister, elle vomit en cours de route.
« Accroche-toi, nous arrivons. »
Comme l'avait annoncé l'instructrice, en moins de deux minutes, ils atteignirent leur destination. Aucun monstre ne les intercepta durant leur trajet, l'instructrice étant bien trop rapide pour qu'aucune créature puisse les suivre.
Arrivés sur les coordonnées du dernier signal détecté, l'instructrice stoppa net. Son visage se tendit alors qu'elle semblait tenter de percevoir quelque chose au-delà de ses sens normaux.
« Il y a une barrière occulte ici. Mes perceptions ne traversent pas. »
L'inquiétude de Sylvie monta d'un cran lorsque l'instructrice mentionna la barrière. La situation dépassait clairement le cadre habituel, exigeant une extrême prudence.
« O-on entre vraiment là-dedans ? » balbutia-t-elle, sentant la panique lui nouer la gorge.
« Nous n'avons pas le choix. »
« M-mais... »
« Ne t'en fais pas. Je maîtrise la situation. »
Sur ces mots rassurants, l'instructrice tendit sa paume vers l'avant, d'où émana une douce lueur opalescente. D'un geste précis, elle effleura la barrière invisible qui se mit aussitôt à scintiller, révélant enfin le spectacle caché derrière.
« Quoi... ? »
La scène qui s'offrit alors à leurs yeux glaça littéralement le sang de Sylvie.
Alors que la barrière se dissipait comme un brouillard matinal, le tableau qui se dévoila était un cauchemar vivant mêlant horreur et désespoir. Les stigmates d'un combat acharné marquaient chaque centimètre carré des lieux.
Des éclaboussures de sang maculaient les surfaces. Des cadavres de monstres difformes gisaient éparpillés, transpercés par des flèches qui ne laissaient aucune ambiguïté sur leur sort funeste.
Pourtant, ce n'était aucun de ces détails qui capta leur attention.
Au cœur de cette arène macabre gisait un jeune homme, son corps mutilé baignant dans une mare de sang déjà en train de coaguler. Ses cheveux ébène étaient souillés de poussière et de sang desséché, son torse lacéré de blessures profondes.
Le liquide vital avait formé une flaque écarlate autour de lui, offrant un contraste saisissant avec la pierre froide du donjon. Mais le détail le plus horrifiant restait son bras droit, sectionné net au niveau du coude comme par une lame surnaturellement tranchante.
« Buerk ! »
Sylvie ne put retenir un nouveau haut-le-cœur et vomit pitoyablement. Son estomac déjà fragile ne supporta pas cette vision d'horreur.
« Respire profondément », conseilla l'instructrice en lui tapotant le dos avec une certaine douceur. Pendant ce temps, ses yeux experts balayaient l'environnement, ses sens en alerte maximale pour détecter la moindre menace résiduelle.
Après une inspection minutieuse de quelques secondes, elle hocha finalement la tête avant de se précipiter vers le corps inanimé, entraînant Sylvie dans son sillage.
« Haaa... Haaaa... »
Tandis que Sylvie tentait désespérément de calmer sa respiration saccadée, son regard parcourut involontairement le champ de bataille dévasté.
Le donjon ressemblait à une scène de carnage apocalyptique, chaque détail témoignant d'une lutte sans merci. L'atmosphère glaciale et oppressante lui comprimait la poitrine, et elle pouvait distinguer des entailles profondes creusées dans la pierre, preuves tangibles d'échanges violents.
Des projections de sang maculaient les parois environnantes, tandis que les dépouilles monstrueuses jonchaient le sol dans des postures grotesques, leurs corps perforés par des projectiles et ouvertures diverses.
Lorsqu'elles parvinrent enfin auprès du blessé, l'instructrice vérifica instantanément son pouls avant d'évaluer l'étendue des dégâts.
« Son état est critique. Nous devons intervenir sans délai. »
Mais quelque chose clochait dans cette image. Cette silhouette... Sylvie la connaissait intimement. Ces traits anguleux, cette peau pâle, cette chevelure caractéristique...
Tout lui était douloureusement familier.
« Astron... »
L'individu gisant dans son sang n'était autre que cet énigmatique camarade de classe...
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Si l'on demandait un jour à Sylvie de décrire Astron, elle répondrait sans doute qu'il était un cas particulier.
Et cela ne tenait ni à son comportement, ni à son apparence physique. L'académie comptait pléthore d'étudiants préférant la solitude à la compagnie.
Il existait également de nombreux individus au physique avantageux. Même à l'Académie des Chasseurs d'Arcadia, certains élèves issus de lignées prestigieuses affichaient une beauté quasi surnaturelle, niveau qu'Astron n'approchait même pas.
Il ne brillait pas non plus par ses capacités martiales, occupant régulièrement la dernière place du classement.
Non, ce qui le rendait unique résidait ailleurs.
C'était l'océan d'émotions qu'il dissimulait sous une surface lisse.
Sylvie possédait un don particulier, hérité de son [Autorité du Premier Seigneur].
Elle percevait les sentiments que les gens s'efforçaient de cacher.
Lors de leur première rencontre à l'académie, la haine qui émanait de sa palette émotionnelle était d'une noirceur telle qu'elle n'en avait jamais contemplé de pareille auparavant.
Elle s'était interrogée. Quel événement cataclysmique avait bien pu engendrer une telle désolation chez un être si jeune ? Quelle tragédie avait sculpté cette douleur si profonde ?
Ces questions lancinantes avaient éveillé sa curiosité morbide, la poussant à en apprendre davantage sur lui. Ce n'était pas de l'attirance romantique, mais plutôt une fascination clinique.
Puis, elle l'avait observé se faire persécuter et maltraiter. Consciente de sa faiblesse intrinsèque, elle avait tenté de l'aider comme elle le pouvait, soignant parfois ses blessures à distance ou atténuant subrepticement ses douleurs grâce à son don.
Toutefois, son manque de maîtrise limitait grandement son assistance, et il ne semblait guère remarquer ses interventions.
Mais ensuite, une métamorphose s'était opérée en lui. Quelque chose dans son essence même avait basculé. L'océan de souffrance et de rancœur en son cœur avait été submergé par une nouvelle entité. Quelque chose de... vide.
Une indifférence glaciale. Comme si un voile grisâtre avait enseveli ses émotions sous une couche d'apathie impénétrable.
« J'anéantirai ton existence, comme j'exterminerai ta lignée tout entière. »
Elle se remémorait encore parfaitement ces paroles glaçantes prononcées ce jour maudit - cette voix métallique qui lui avait glacé la moelle.
Puis était venu leur affrontement. Là, il avait proféré des vérités qu'elle refusait d'entendre.
Des mots qui réveillaient des souvenirs enfouis... ces souvenirs qu'elle s'efforçait d'oublier...
Il avait réussi à faire resurgir ces démons intérieurs, alors elle s'était éloignée de lui en toute hâte.
Un acte de lâcheté, certes, mais qui pourrait sincèrement lui reprocher de vouloir préserver sa santé mentale ?
Pourtant, au fil des semaines d'académie, la situation avait évolué. Elle avait participé à davantage d'exercices pratiques et d'expéditions avec son équipe, commençant enfin à apprécier sa vie estudiantine.
Sorties entre amies, utilisation de ses capacités pour venir en aide aux autres, activités parascolaires...
Elle partageait le même club qu'Astron, mais comme pour respecter sa décision de mettre de la distance entre eux, il n'avait jamais rompu le silence. Il ne l'avait jamais abordée, vaquant simplement à ses occupations et assistant ponctuellement aux réunions.
Une barrière invisible semblait s'être érigée entre eux, et Sylvie savait pertinemment qu'elle en était l'architecte.
Mais cette dynamique avait volé en éclats la semaine précédente, lorsqu'il lui avait expliqué ce problème mathématique. À ce moment précis, elle avait senti la distance entre eux se réduire imperceptiblement, comme si un rempart avait commencé à s'effriter.
Et en l'observant étudier avec une concentration absolue, sa méticulosité presque obsessionnelle, elle avait compris une évidence : il se battait tout autant qu'elle, chacun à sa manière.
Et maintenant, cette même personne gisait inconsciente devant elle, son existence fragile entre ses mains...
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[Note de l'auteur] Mes examens ont commencé, ce qui explique pourquoi les chapitres seront légèrement plus courts pendant cette période. Dès que mes épreuves seront terminées, je reprendrai les publications normales d'Eroge ; il est temps que je me concentre sur mon organisation.
Un grand merci pour votre soutien indéfectible jusqu'à présent.