Chapter 153 34.4 - First Step [Interlude]
Chapitre 153 34.4 - Premier Pas [Interlude]
Chapitre 153 34.4 - Premier Pas [Interlude]
Reiner contempla ses mains avec une expression troublée, ressentant une dissonance profonde en son être.
« Qu'est-ce que je viens de faire ? »
Une étrangeté palpable l'envahissait. Comme si une force étrangère avait temporairement pris possession de son corps. L'intensité démesurée de la colère et de la peur qui l'avaient submergé dépassait toute rationalité.
CLAP ! CLAP ! CLAP !
Le bruit sec des applaudissements brisa soudain le silence de la salle de recherche, arrachant Reiner à ses pensées confuses.
« Quoi... ? »
La réalité le frappa alors avec la force d'un coup de massue. Ils n'étaient pas seuls dans cette pièce. L'explication de son état aberrant se tenait là, dans l'ombre.
« J'ai oublié ? »
L'existence même de cet assaillant s'était effacée de son esprit, une omission contre nature qui le glaça d'effroi.
« Ça a vraiment fonctionné... »
Alors que les applaudissements persistaient, une silhouette émergea lentement des ténèbres. L'être mystérieux portait un masque inquiétant qui dissimulait entièrement ses traits, sa capuche noire comme l'abîme absorbant toute lumière environnante.
L'aura ténébreuse qui émanait de cette présence était contrebalancée par une étrange lueur argentée - un mélange dérangeant de mana pur et de noirceur absolue qui donnait naissance à une atmosphère oppressante.
Reiner reconnut instantanément son adversaire. Les ombres dansantes, les flèches imprégnées de mana - tout correspondait parfaitement à cette silhouette énigmatique.
TAP ! TAP !
L'assaillant, autrefois silencieux, se mit à avancer avec lenteur, chaque pas soigneusement mis en scène pour semer la terreur.
Quand les applaudissements cessèrent enfin, une voix glaciale fendit l'air :
« Félicitations. Vous m'avez considérablement simplifié la tâche », ricana la silhouette, son ton chargé d'une satisfaction malsaine. « Vous battre comme des bêtes enragées... La parfaite démonstration de votre nature de chiens dociles. »
Les yeux de Reiner se plissèrent, son regard mêlant rage et désespoir tandis qu'il fixait la forme encapuchonnée.
'C'est ce fils de pute.'
La présence sinistre de l'assaillant attisa les braises de sa colère jusqu'à les transformer en un brasier dévorant.
'Je vais l'exterminer.'
« Grrr... »
Les dents serrées à s'en briser, Reiner puisa dans les dernières réserves de son énergie démoniaque. Son rugissement bestial résonna dans la pièce alors qu'il se ruait vers sa cible telle une bête acculée.
« RAAAA ! »
La peur et la rage l'avaient transformé en une masse informe de chair démoniaque, à peine reconnaissable comme humaine.
SWOOSH ! Ses mouvements désordonnés étaient guidés par une détermination aveugle, la furie pure d'un prédateur traqué.
Mais lorsque sa lame traversa l'air, elle ne rencontra que le vide.
'Hein ?'
« Tu es incorrigible, n'est-ce pas ? »
La voix moqueuse de l'encapuchonné flotta dans l'air, chaque syllabe chargée de venin.
SWOOSH ! SLASH !
Avant que Reiner ne puisse réagir, l'attaquant se déplaça avec une rapidité déconcertante. Son corps épuisé atteignait ses limites physiques, mais le véritable supplice était mental - dix minutes seulement avaient suffi à briser son esprit.
Les dagues argentées dans les mains de l'assaillant dessinèrent des arcs lumineux dans l'obscurité, laissant derrière elles des traînées spectrales.
« Gah ! » Le cri de Reiner résonna lorsque les lames imprégnées de mana tranchèrent sa chair démoniaque avec une facilité dérangeante.
À cet instant, la peur véritable s'empara à nouveau de lui.
'Non... Je ne peux pas mourir... Pas maintenant...'
Les portes de la mort semblaient grandes ouvertes, et quelqu'un y jetait un regard intéressé.
« ESPÈCE DE SALAUD ! »
Reiner hurla pour chasser sa terreur.
RAAAAAR ! Son rugissement désespéré emplit la pièce alors qu'il mobilisait ses dernières réserves d'énergie. L'aura cramoisie autour de lui flamba violemment, créant un contraste saisissant avec la lueur argentée des dagues adverses.
« Tu confirmes mes attentes - une simple bête », murmura la silhouette, sa voix glaciale semblant provenir de partout à la fois.
Puis, avec une rapidité surnaturelle, l'ombre disparut, comme absorbée par les ténèbres environnantes.
Reiner, le cœur battant la chamade, tenta désespérément de localiser son adversaire.
« Où es-tu, enfoiré ? » Sa voix tremblait de rage et de panique. Ses yeux écarquillés balayaient frénétiquement la pièce, ses sens exacerbés par l'adrénaline.
Les murs semblaient se rapprocher, les ombres devenir vivantes. Reiner percevait chaque bruissement d'air, chaque infime mouvement, mais l'assaillant restait introuvable.
Chaque seconde s'étirait démesurément. Son esprit, déjà épuisé par les événements précédents, luttait pour rester cohérent malgré la douleur lancinante de ses blessures.
« Montre-toi, lâche ! » gronda-t-il entre des respirations saccadées.
RUSTLE !
'Derrière moi.'
Au son soudain, Reiner attaqua avec la fureur aveugle d'un animal traqué.
« RAAAA ! »
SWOOSH ! SWOOSH ! SWOOSH !
Ses lames démoniaques découpèrent l'air dans une frénésie destructrice. Ses mouvements n'obéissaient plus à aucune logique tactique, seulement à l'instinct primaire de frapper tout ce qui bougeait.
Mais ses attaques ne rencontrèrent que le vide - l'assaillant restait aussi insaisissable qu'un mirage. Transpirant à grosses gouttes, Reiner pivota sur lui-même, ses sens en alerte maximale.
« Quel est le problème, Reiner ? » La voix narquoise de l'encapuchonné semblait provenir de nulle part. « L'inconnu te terrifie à ce point ? »
Alors que les moqueries continuaient, une peur viscérale paralysa Reiner.
« Toi qui te prenais pour un prédateur... Regarde-toi maintenant. Une simple proie terrifiée », persifla la voix, chaque mot distillant un venin psychologique. « Comment ça fait, Reiner ? Cette sensation d'impuissance ? »
Ses mouvements devinrent erratiques, sa confiance d'antan remplacée par une terreur primitive.
La pièce semblait se déformer autour de lui, les ombres dansant de manière menaçante. Il frappait au hasard, espérant toucher l'insaisissable ennemi.
« Tu croyais être devenu quelqu'un en obtenant ce pouvoir... », chuchota la voix, enveloppant Reiner comme un linceul, « mais regarde-toi - perdu, apeuré, exactement comme avant. »
SURSAUT ! Ces mots firent tressauter Reiner, réveillant des souvenirs enfouis.
Les coups de son père sur sa mère.
Son impuissance face aux enfants Éveillés qui le harcelaient.
'Comment sait-il tout ça ?'
Les bruits fantomatiques s'intensifièrent, jouant cruellement avec ses nerfs à vif.
« Haah... Haaah... Comment... comment tu sais ? »
Sa respiration était un râle entrecoupé alors que les ténèbres semblaient l'étouffer. Son corps autrefois puissant n'était plus qu'une enveloppe tremblante.
« Les gens comme toi, qui cherchent le pouvoir pour fuir leur passé... sont tous identiques », résonna la voix, frappant au plus profond de ses peurs. La pièce semblait se rétrécir, les ombres devenant presque physiques.
« Comment tu sais ? » hoqueta Reiner, sa vision commençant à se brouiller sous l'effet cumulé de ses blessures.
SWOOSH ! STAB !
À cet instant précis, la silhouette se matérialisa devant lui, ses dagues argentées brillant d'une lueur surnaturelle. Sans un mot, elle franchit la distance et l'acier froid transperça le cœur de Reiner.
« ARGH ! » Le cri de Reiner se transforma en un gargouillis lorsqu'un flot de sang jaillit de sa bouche. « BURGHK ! » Son cœur démoniaque cessa progressivement de battre.
Alors que sa conscience s'évanouissait, les derniers mots de l'assaillant lui parvinrent :
« Nous sommes peut-être semblables... Tu as simplement choisi le mauvais maître. »
Les lames argentées furent la dernière chose qu'il vit avant que les ténèbres ne l'engloutissent définitivement.
***********
Dans le monde réel, dépourvu de rêves, chaque action a des conséquences. Rien n'est gratuit.
La force s'acquiert au prix d'un sacrifice - qu'il s'agisse de temps consacré à l'entraînement, de ressources dépensées ou de mana accumulée.
Mais qu'en est-il des adeptes des démons ?
Passent-ils des heures à s'entraîner pour maîtriser leurs pouvoirs ? Dépensent-ils fortune en artefacts et potions ?
Non. N'importe quel paria, quel raté peut embrasser la voie démoniaque. C'est précisément pourquoi les rejets de la société s'y précipitent.
Le monde est cruel.
Certains naissent sans argent. D'autres sans temps à consacrer. D'autres encore sans le moindre talent.
Plutôt que d'accepter leur condition, la nature humaine les pousse à chercher des raccourcis.
Des moyens d'acquérir du pouvoir.
Les démons exploitent simplement cette faiblesse. Ils offrent la force tant convoitée.
Mais comme je l'ai dit, rien n'est gratuit.
Quel intérêt les démons trouvent-ils à octroyer cette énergie ? Quels effets délétères sur les humains ?
Comme dans toute société intelligente, une hiérarchie existe parmi les adeptes. Ceux du bas de l'échelle reçoivent une énergie brute, instable, difficile à contrôler.
Le corps humain est conçu pour la mana. L'énergie démoniaque est un corps étranger qu'il rejette violemment. Mais avec le temps, le corps s'adapte... se transforme...
Ces mutations rapprochent de la nature démoniaque. C'est pourquoi un usage prolongé rend impossible le retour à l'humanité.
Les changements sont trop profonds.
L'énergie de bas niveau exacerbe les émotions, érode la rationalité. Un véritable catalyseur de folie.
C'est alors qu'une idée m'est venue.
En combattant ces deux-là dans le donjon, j'avais remarqué que leur énergie était bien inférieure en qualité à celle de Fred.
Puisque Fred n'était même pas un haut gradé, cela signifiait qu'ils étaient tout en bas de la hiérarchie.
J'ai donc décidé d'expérimenter.
'Fiole de Berserk.'
Dans le jeu, cette potion commune rendait les monstres incontrôlables. Les joueurs l'utilisaient pour les faire s'entretuer avant de porter le coup de grâce.
Si ces adeptes étaient si bas dans l'échelle, ne pourrais-je pas reproduire l'effet ?
J'ai étudié la recette, modifié certains ingrédients pour cibler spécifiquement les démoniaques.
Puis j'ai enduit mes flèches de ce mélange.
Simple test. Si ça échouait, peu importe. Si ça fonctionnait... ce serait une arme précieuse.
Et voilà le résultat.
Devant moi gisaient ceux qui avaient tenté de me tuer, réduits à l'état de bêtes incapables de distinguer ami d'ennemi.
Comme les démons immondes qu'ils servaient, ces chiens en avaient hérité la hideur.
'Tel maître, tel chien.'
La haine brûlait toujours en moi à leur vue. Une colère inextinguible.
'Pas assez.'
Ce n'était qu'un début.
'Le premier pas.'
Mais significatif. J'avais validé une méthode.
'Un nettoyage s'impose avant de partir.'
Mes yeux se posèrent sur les corps inertes. Avant de quitter les lieux, je pris soin de récupérer leurs montres.
L'instigateur de tout ceci devait encore être traité.
Ainsi s'accomplit le véritable premier acte de ma vengeance.