Chapter 265 - Revision Interface
Tower Of Karma
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Chapitre 267
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<h1>Chapitre 267</h1> <p>À mon cher William,</p> <p>Si tu lis ces mots, je suis déjà mort. Avant de déclarer la guerre, c'était très embarrassant, mais je persiste à penser... Ah, est-ce encore le cas ?</p> <p>J'ai longtemps couru après ton ombre. Chaque jour, je la poursuivais désespérément, comme si ma vie en dépendait. Il y eut des moments grandioses, mais aussi beaucoup de tristesse et de douleur. Pourtant, je peux affirmer avoir été heureux.</p> <p>Te rencontrer fut l'événement le plus fortuné de mon existence.</p> <p>Ce jour-là, tu as tenté de m'abandonner. Ce fut un choc, mais à y repenser maintenant, c'était compréhensible. Dans l'enfer de la défaite, chacun ne pense qu'à sa survie. Ta réaction était naturelle. Pourtant, au-delà de tes propres limites, tu m'as tendu la main. Je n'oublierai jamais ton expression stupéfaite à cet instant.</p> <p>Certes, ce n'est pas un souvenir glorieux. D'aucuns diraient que ce n'était pas « toi ». Le William logique, stratège, calculateur – celui qu'Anselm reconnaîtrait.</p> <p>Mais je crois que le geste que tu as eu ce jour-là révèle ta vraie nature. Je ne suis pas un imbécile. Tu es enveloppé de mal, porteur d'innombrables fardeaux, et leur contenu dépasse l'entendement. Pourtant, je prétends les comprendre. Je l'écris car ceci est un testament.</p> <p>Par-dessus tout, je te trouve désespérément naïf. Schulster l'avait bien vu : au nord, tu es trop gentil sur le champ de bataille. Les guerriers ne se souviennent pas de chaque vie ôtée ou perdue. Seuls les moments marquants persistent.</p> <p>Je ne comprenais pas alors, mais c'est l'évidence même. Car le guerrier que tu es porte en réalité un cœur blanc, visible seulement aux yeux des ours polaires, comme tu dis.</p> <p>Que d'aventures nous avons vécues. La décennie la plus éprouvante. Et pourtant la plus exaltante. Nous nous battions main dans la main. Combattre, fuir, fuir encore, combattre à nouveau. Sur le moment, je trouvais cela terriblement monotone, surtout au nord. Il y a une limite au nombre de monstres qu'on peut éliminer. Si j'y retournais aujourd'hui, ces souvenirs me sembleraient dangereusement futiles. Bien sûr, j'y ai aussi ma part de responsabilité.</p> <p>Lors de notre première campagne contre les Naderkus, tu m'as nommé dans l'état-major. Tu as cru en moi. J'étais au fond du gouffre, mais infiniment heureux. J'ai appris dans ton sillage. Tu m'as enseigné. J'ai prouvé ma valeur, obtenu des résultats, et enfin trouvé ma place.</p> <p>Tout cela, je te le dois. Merci. Du fond du cœur.</p> <p>Et pourtant, je n'ai pas su aller au bout. J'ai donné le maximum, mais sans égaler ta grandeur. Peut-être est-ce là le résultat. Je ne saisis pas tout aujourd'hui, mais je devine que cette lettre est la dernière chose qui me manquait.</p> <p>Tu as changé. Pour les étrangers, c'est admirable. Mais plus on te connaît, plus c'est terrible – surtout pour toi-même. Ce fardeau écrasant que tu portes, je l'ai découvert sur mon propre dos. Il est lourd. Si lourd qu'il menace de m'écraser chaque jour.</p> <p>Pourtant, je pense qu'il serait bon de poursuivre aussi ton bonheur personnel. Rutgard t'apprécie, Alfred adore son père. Eris ne vit que pour toi. Je peux m'enorgueillir un peu. Claude, Marianne... N'oublie pas que tant de gens prient pour ton bonheur. J'en fais partie.</p> <p>C'est pourquoi j'ai accepté le poste de général. Je rêvais de me tenir à tes côtés, de te soutenir, de partager ton fardeau. Le résultat est cette lettre. J'espère qu'elle ne te parviendra jamais, que nous pourrons combattre ensemble, et que tu vivras enfin comme un homme.</p> <p>Qu'ai-je pu faire pour toi ? Rien qui ne soit déjà en toi.</p> <p>Signé, Carl von Taylor, général en chef, ton ami le plus proche.</p> <p>Post-scriptum : Quel dommage. Mais tu peux gagner. J'ai observé et compris Ernst. Toi, tu n'y es pas parvenu. Donc tu ne peux perdre. Ma seule inquiétude ? Ta trop grande douceur. Enfin... jusqu'à il y a sept ans ? Oui, sur ce point, je suis serein. Sept années ont passé. Assez pour que tu développes une main capable de terrasser le Fils de Dieu. Je ne pouvais perdre, mais je ne voyais pas comment gagner. Telle est la différence.</p> <p>Tu découvriras peut-être le subalterne qui m'a poignardé. Il pourrait se confesser. Dans ce cas, pardonne-lui. Je ne lui pardonnerais pas s'il prétend à l'innocence. À présent, je pense que c'est acceptable. Mais demande-lui : celui qu'il aime, est-ce celui qu'il voulait protéger ? Tu le sais mieux que quiconque. Alors questionne-le.</p> <p>Et je n'en ai pas fini. Merci. Adieu–</p> <p>William laissa échapper un soupir. Profitant d'un moment de répit, il relut la lettre maintes fois, bien qu'il en connaisse chaque mot par cœur, comme une mélodie obsédante.</p> <p>« Est-ce là la nature dont les gens parlent ? Jusqu'au bout, tu seras cet homme incompris. »</p> <p>Les hommes de Carl et Dieter avaient déjà gagné le nord avec leurs familles. Il leur avait interdit tout acte d'automutilation, les condamnant à vivre en exil. Sans leur révéler que tel était le vœu du général Karl. Ces vers... ils équivalaient à détruire une vie.</p> <p>Cet homme n'aurait jamais voulu que ses hommes portent le poids de sa mort. C'était mieux ainsi.</p> <p>« Je ne répondrai pas à ton espoir. J'utiliserai même ta mort pour m'élever. Mais laisse-moi te faire une promesse : je protégerai ce pays comme tu l'aurais voulu, à ma manière. Je tisserai des liens vers un avenir lointain. Et pour cela, je continuerai à commettre le mal. »</p> <p>Il posa une main sur sa poitrine et inspira profondément.</p> <p>« Jusqu'à mon dernier souffle. »</p> <p>Ainsi jura-t-il à son ami disparu.</p> <p>○</p> <p>Sous un soleil radieux, une foule immense s'était rassemblée à Arkas pour un seul homme. Ce jour lumineux, que tous contemplaient avec mélancolie, semblait être le plus beau de l'année. C'est par cette journée parfaite que se déroulèrent les funérailles nationales.</p> <p>« Notre héros, le général d'Arcadia, Carl von Taylor.</p> <p>Peut-être le héros le plus proche du peuple qui ait jamais existé. Bien que noble, son caractère était exempt d'orgueil, son attitude humble, souvent teintée de gêne. Un héros qui partagea bonheurs et épreuves, toujours à hauteur d'homme.</p> <p>Ceux qui le connaissaient comme ceux qui l'ignoraient. Tous avaient entendu ses paroles. Le général le plus aimé d'Arcadia fut entouré d'une affliction unanime, au milieu de la plus grande foule jamais rassemblée.</p> <p>Enveloppé de fleurs, cerné par la foule, bercé par les lamentations et l'amour,</p> <p>(Tu es heureux. Je ne mourrai pas ainsi.)</p> <p>En esprit, il vivra dans chaque cœur. Un héros ne meurt que lorsque s'éteint le dernier qui se souvient de lui.</p> <p>Le discours royal sembla interminable. Des mots flatteurs, mais qui ne captaient rien de l'essence de l'homme. C'était insupportable à entendre.</p> <p>« – Il y aurait tant à dire, mais une chose prime. Un autre héros se tient parmi nous : le général d'Arcadia, William Payne Liwyus. »</p> <p>Une ovation éclata. Peu importait l'irritation royale, William avait gagné la foi du peuple par des vertus différentes de Karl. Son caractère, ses actes, son expérience foudroyante. Comment ne pas vénérer l'homme qui sauva Arcadia des griffes de Gallias et des Naderkus ?</p> <p>« Je cède la parole à l'ami. »</p> <p>Le roi descendit, William monta. Les yeux du roi lançaient des éclairs – contraint par la pression populaire lors de ces funérailles nationales, il ne pouvait s'opposer à ce discours. Sa rage se lisait dans ses prunelles enflammées.</p> <p>Face à lui, William dominait l'estrade. Des milliers, des dizaines de milliers de personnes s'étendaient sous son regard. L'horizon au-delà d'Arcas. C'était la vue du roi : tout ce qui se voyait – et au-delà, jusqu'aux confins invisibles du royaume. Même dans cette situation, son cœur battait plus fort. Cette excitation le dégoûtait.</p> <p>« Je suis William von Liwius, général du royaume d'Arcadia. Sa Majesté me donne l'occasion de parler ainsi de mon ami, bien que submergé par le chagrin.</p> <p>Pour conclure–</p> <p>« Je vous parlerai d'un temps lointain. J'ai rencontré Karl loin de Laconia, avant même de porter ce masque. »</p> <p>Il allait se montrer à nu. William ôta son masque en public, geste extraordinaire. La plupart des présents découvraient son visage. Digne d'un héros, ses yeux irradiaient une lumière puissante.</p> <p>Contrairement à Carl, dont l'aura enveloppante était douce, William écrasait par sa présence et son éclat. Le masque n'était plus qu'une prison devenue inutile.</p> <p>« Tout commença avec un simple soldat. Timide, sans pouvoir. Arraché à Laconia, je la repris et nous marchâmes ensemble. Tant de champs de bataille, de duels mortels. Pas seulement des victoires propres – nous fuyions l'ennemi insurmontable, triomphant parfois couverts de boue. Progressant pas à pas. Lui avec sagesse et courage, moi avec force et savoir. »</p> <p>Sa voix portait loin. Chaque mot, chaque respiration était captée, mais sa voix contenait plus que des sons. Un timbre clair résonna sous le ciel pur. Sans cris. Sans emphase. Et pourtant–</p> <p>« Le papillon craintif trouva du courage. Le faible que j'étais devint fort. Nous nous complétions, nous élevions mutuellement... Je pense qu'aucun jour depuis n'a été aussi accompli. Nous eûmes la chance de survivre, et c'est précisément pourquoi il ne pouvait pardonner. »</p> <p>Pourquoi cette voix vous transperçait-elle ainsi ?</p> <p>« Nous n'étions pas spéciaux au départ. Nous donnions simplement notre maximum, comme tant d'autres. Le hasard nous fit survivre. Au-delà des sacrifices innombrables, il redoubla d'efforts, par culpabilité. Il aimait le peuple, les victimes à protéger, la nation à défendre. Bon, juste, intègre dans ses relations avec vous. »</p> <p>Peu héroïque, penseront certains. Et pourtant, ni William ni Carl ne naquirent héros. L'un était un gamin chétif couvert de boue, l'autre un rejeton noble sans talent apparent.</p> <p>« D'innombrables sacrifices jonchent notre chemin. Ceux d'hier soutiennent les vivants d'aujourd'hui. Pour protéger leurs aimés, par richesse, honneur, ou toute autre raison. Ceux qui donnèrent leur vie nous permettent de vivre ! Carl les a rejoints. En esprit, il nous soutient. »</p> <p>William ouvrit les bras. Grandiose–</p> <p>« Honnorons-les. Transmettons le pays qu'ils aimèrent, protégèrent et nourrirent. Jusqu'au jour où nous les rejoindrons. Jusqu'à ce qu'ils deviennent l'histoire fondatrice de cette nation. Vous tous, vos efforts bâtiront demain. Chacun deviendra histoire à son tour. Alors avançons. Pleurons aujourd'hui. Demain, honorons leur sacrifice ultime dans cette guerre. »</p> <p>Ceux qui connaissaient William furent stupéfaits. L'homme qui ne montrait jamais la moindre faiblesse ne cachait pas les larmes roulant sur ses joues. Leur héros, si fort, si cruel parfois, révélait enfin–</p> <p>« Karl était mon ami. Le premier et le meilleur que je trouvai en ce pays. Attends un peu. Je ferai de cette nation la plus glorieuse de Laurencia. Pour qu'enfin, nous puissions accueillir l'avenir en paix. »</p> <p>Il paraissait si seul soudain.</p> <p>Plus fort que quiconque, plus héroïque que tous. Ses larmes témoignaient de la vulnérabilité qu'il montrait pour la première fois, en hommage au doux héros disparu.</p> <p>Des gouttes tombèrent sur le ciel bleu d'Arcadia. Pleurons aujourd'hui pour demain.</p> <p>Vivre en bonne santé demain, car c'est l'espoir des morts–</p> <p>○</p> <p>Alfred écouta le discours de son père avec gravité. Trop jeune pour tout comprendre, il sentit néanmoins germer quelque chose en lui. Voyant les larmes des gens, celles de la fille qu'il aimait, et même de sa tante toujours si forte–</p> <p>Il vit les pleurs de son père, le plus fort de tous, et ceux de sa mère, la plus tendre.</p> <p>Peut-être ces mots s'adressaient-ils à lui. Ce jour-là, le garçon apprit la faiblesse. Connaître la force est important. Un jour, ces mots prendraient sens.</p> <p>« Papa, je... »</p> <p>D'abord, Alfred se tourna vers sa mère. Que dire pour apaiser ses sanglots ? Il réfléchissait quand–</p> <p>« ...... »</p> <p>il la vit. Lentement, sa bien-aimée mère s'effondra.</p> <p>« Maman ! »</p> <p>Évidemment, l'enfant ne put la retenir. Alfred tendit les bras, subissant la douleur sans y prêter attention.</p> <p>« Ruthto ! »</p> <p>Hilda, en pleurs, accourut. Einhart suivit, livide. Lui restait là, impuissant.</p> <p>« Qu'on selle un cheval ! Je la porterai. »</p> <p>Son impuissance le torturait.</p>