Chapter 7 - Revision Interface

Tower Of Karma

Translation Status
Completed
Confidence Score
72.0%
Validation
Passed
Revision History
Version Model Confidence Validation Date Actions
v1 openrouter/polaris-alpha 86.0% Failed Nov 13, 2025 08:23
Latest Revision (v1)
Revised Title

Chapitre 6

Revised Content

<h1>Chapitre 6</h1><p>La demeure de Lord Taylor n’avait rien à voir avec Khana. Pourtant, des meubles et des décorations de bon goût ornaient la maison. L’atmosphère entière était harmonieuse, unifiée autour d’un thème. À vrai dire, cela révélait un sens esthétique qu’on ne retrouvait pas chez la plupart des citoyens de première classe, même ceux aux goûts raffinés.</p><p>« On dit souvent que les pères ne dépensent pas beaucoup pour ce genre de choses et qu’ils ont des maisons ternes, mais moi, j’aime beaucoup celle-ci. »</p><p>William approuva les paroles de Carl. Ce n’était pas tape-à-l’œil, mais élégant.</p><p>« Moi aussi, je préfère ça. »</p><p>« Voilà, pas de révérence, pas de mots polis ! »</p><p>(J’ai été forcé de choisir, tant pis.)</p><p>Face au regard noir que Carl lançait à William, celui-ci était intrigué.</p><p>(Le jardin et les murs ne sont pas très hauts. En cas d’urgence, je peux m’enfuir.)</p><p>Le jardin n’était pas très vaste, mais restait agréable. En son centre, une fontaine et un bassin. En temps normal, ce spectacle lui aurait peut-être arraché un soupir de contentement, mais William n’en avait pas le loisir.</p><p>(L’agencement ne présente rien de particulier. Sans tout inspecter, je devine déjà les structures et les passages.)</p><p>Si Carl faisait un geste, il devait être prêt à fuir au cas où le père de Carl déciderait de faire de William un mort « accidentel ».</p><p>La probabilité était faible. Mais pas nulle.</p><p>« On y est. Tu ferais bien de te préparer pour le repas. »</p><p>Carl leva la main. Des domestiques attendaient devant la porte. Le maintien mesuré de la servante, en tenue sobre, trahissait une solide éducation.</p><p>« …Compris. »</p><p>William resta impassible. À ce stade, il était prêt. Une entrevue avec un noble, chose qu’il n’aurait jamais imaginée ; une occasion bien trop précoce, mais une occasion tout de même.</p><p>(Je ne perdrai pas…)</p><p>Il avait fini de se préparer.</p><p>« Veuillez entrer. Carl, Livius. »</p><p>Une grande femme de chambre ouvrit la porte. Celui qui était assis derrière elle—</p><p>« Bienvenue dans la maison Taylor. Sois le bienvenu, William. »</p><p>Lord Taylor. Le premier noble que William voyait de sa vie.</p><p>« C’est un grand honneur d’être invité, Lord Taylor. »</p><p>William s’inclina profondément. Il avait appris deux ou trois rudiments de bienséance, tirés de ses lectures. C’était sa première mise en pratique, sa première rencontre avec des nobles—</p><p>« C’est vraiment des cheveux blancs comme la craie. Je m’attendais à voir arriver un homme grisonnant, Carl. »</p><p>William tourna le regard vers la voix. Un homme aux cheveux blonds ondulés, difficiles à discipliner. Il avait quelques années de plus que Carl et William.</p><p>« Excuse-moi, c’est mon grand frère. »</p><p>Carl, vaguement gêné, répondit.</p><p>« Où sont mes manières. Je me nomme Einhart von Taylor. Je suis érudit, et le frère aîné de Carl. »</p><p>En voyant Einhart s’incliner avec gravité devant lui, William baissa la tête par réflexe. Au fond, Lord Taylor souriait comme s’il trouvait la scène très à son goût.</p><p>« Et, assise en face de moi, voici Rutgard, notre chère petite sœur. »</p><p>La jeune fille assise en face d’Einhart s’inclina avec gêne. Lorsque William posa les yeux sur elle, Rutgard détourna le regard.</p><p>(…Elle n’aime pas avoir affaire aux roturiers, peut-être ?)</p><p>William ne laissa rien paraître. Mais il n’était pas tranquille. L’homme assis au fond, le frère de Carl, Einhart, et même Rutgard donnaient l’impression de le toiser. Ou plutôt, c’est ainsi qu’il se surprenait à le ressentir.</p><p>« Ah, Rutgard est juste timide avec les gens. Allez, salue-le comme il faut ! »</p><p>Carl gonfla les joues, boudeur. En le voyant, Rutgard prit un air peiné.</p><p>« Je suis Rutgard. Enchantée de faire votre connaissance, monsieur William. »</p><p>« Je viens de Lusitania. Je suis William Livius. Heureux de vous rencontrer, dame Rutgard. »</p><p>William présenta un passé tissé de vérités et de mensonges. Non, ce n’était pas totalement faux : son « moi » venait bel et bien de Lusitania.</p><p>« Et enfin, je suis Lord Taylor, Laurent von Taylor. Je compte sur toi, William, bienfaiteur et ami de Carl. »</p><p>William fut un peu déconcerté de voir le noble incliner la tête.</p><p>« Asseyons-nous. Nous allons faire un petit festin. »</p><p>« …Veuillez m’excuser. »</p><p>Pour la disposition des places : tout au bout, Laurent. À sa gauche, Einhart puis Carl. À sa droite, Rutgard—</p><p>« …Est-ce que cela vous convient ? »</p><p>« Oui, bien sûr. »</p><p>répondit Rutgard d’une voix presque inaudible. William prit place.</p><p>« Apportez les plats, le dîner va commencer. »</p><p>Le repas s’ouvrit dans un frémissement de mouvements.</p><p>○</p><p>(Je ne sens pas le goût. Qu’est-ce que je mange, là ?)</p><p>Tous les mets servis étaient délicieux, incomparables à ce que William avait connu jusqu’ici. Mais il devait gérer des manières qui lui étaient étrangères, surveiller la conversation, et parler d’une Lusitania qu’il n’avait jamais vue de ses propres yeux. Il en était complètement épuisé nerveusement.</p><p>« —Mais William semble beaucoup étudier. »</p><p>« Ce n’est pas grand-chose. »</p><p>Laurent sourit, le coude posé sur la table.</p><p>« Si, c’est remarquable. Tu parles la langue d’un pays étranger avec aisance, tu t’adaptes à nos manières. Et la finesse qui affleure dans ta façon de converser, sans parler de tout ce que m’a raconté Carl… »</p><p>William trouvait ce sourire inquiétant. Il différait clairement de celui de Carl. Ce regard le jaugeait. Il s’était déjà dit, plus tôt, qu’il y avait quelque chose.</p><p>(Cet homme est en train de me tester.)</p><p>Il l’avait bombardé de questions détaillées sur Lusitania. Avec le recul, toute la conversation semblait destinée à mesurer l’homme nommé William.</p><p>« Je suis encore très imparfait, mais j’ai étudié dur dès que j’ai décidé de venir en Arcadia. »</p><p>« Admirable. De Lusitania, pays lointain, peu se donneraient la peine d’apprendre notre langue. »</p><p>Une sueur froide coula dans le dos de William. Les trois autres mangeaient en écoutant, sans percevoir sa tension.</p><p>« Mais pourquoi Arcadia ? Il y a Ostberg, qui fait aussi partie des Sept Royaumes. Parmi eux, les plus proches de Lusitania sont Estad et Nederlux. Et par-delà la mer, le jeune royaume d’Arkland. Tu dois bien avoir une raison d’avoir choisi Arcadia, non ? »</p><p>Cette question, William se l’était déjà posée. Pourquoi Arcadia ? Sujet inévitable, et il avait préparé sa réponse.</p><p>« …Ce n’est pas une histoire très réjouissante. »</p><p>dit William, l’air embarrassé. Voyant cela, Laurent lâcha un petit « oh ? » amusé.</p><p>« Lusitania est constamment ballottée entre deux grandes puissances. Je ne sais pas quel poids aura mon nom, mais susciter l’hostilité de l’une d’elles serait néfaste, quoi qu’il arrive. Quant à Arkland, jeune royaume, rien ne garantit qu’il me permettrait d’élever le prestige de ma patrie. Il me restait donc Arcadia et Ostberg… et il y a entre eux une différence décisive… »</p><p>William répondit sans hésiter. Tout venait de faits entendus de la bouche du « véritable » William. Il n’avait aucune raison de craindre. C’était la vérité, sans faille—</p><p>« La façon dont les étrangers y sont traités. En Ostberg comme en Arkland, je serais un étranger ; ici, en Arcadia, je suis classé comme citoyen de troisième rang. J’ai quitté mon pays pour me faire un nom. Quitte à choisir, je préfère me placer en Arcadia. »</p><p>Pas l’ombre d’un mensonge. S’il y en avait un, il résidait seulement dans l’identité de celui qui parlait ici. Mais avec ses papiers, ce mensonge devenait réalité—</p><p>« Tu es donc assez ambitieux. »</p><p>C’est Einhart qui réagit.</p><p>« Je n’en suis pas si sûr. »</p><p>William s’inclina devant Einhart.</p><p>« Hm. En termes d’opportunités, Arkland est prometteur. Mais si l’on considère tout, Arcadia s’impose. …Oh, je monopolise la conversation. Le repas va refroidir. Mangez. »</p><p>Laurent mit fin à son interrogatoire et ramena la conversation au dîner. William se fondit de nouveau dans le mouvement général, et chacun se concentra sur son assiette.</p><p>« Ah, encore une chose. »</p><p>« …? »</p><p>William se crispa. Le timing de Laurent, comme s’il avait guetté ce moment précis.</p><p>« Pour quelqu’un d’aussi ambitieux… est-ce que Carl serait un obstacle ? »</p><p>L’atmosphère se figea net. Carl se leva d’un bond.</p><p>« …Qu’est-ce que vous voulez dire ? »</p><p>William était pris de court. Normal : il ne pouvait pas répondre franchement. Froisser Carl ici lui serait fatal. Et un étranger, même soutenu par Carl, restait facile à éliminer.</p><p>« Oh, du calme. J’aime simplement pas l’idée que Carl aille sur le champ de bataille. Mon frère aîné, Einhart, comme je l’ai dit, est un homme d’étude, pas l’héritier de la maison. C’est donc à moi de reprendre la maison Taylor, et je veux que Carl apprenne les affaires. Qu’il renonce au plus tôt me paraît préférable. »</p><p>Carl voulut répliquer, mais le regard de Laurent, bien plus tranchant, le cloua sur place. Définitivement, cet homme n’était pas ordinaire.</p><p>« Je sais que Carl n’a pas de talent particulier pour les armes. Alors autant l’orienter vers un rêve réalisable. Mon fils a confiance en toi. Une parole de ta part pourrait le réveiller. Tu peux l’aider à renoncer, n’est-ce pas ? »</p><p>Il planta sur William un regard qui demandait salut pour Carl. William ravala sa salive.</p><p>Situation épineuse. S’il allait dans le sens de Carl, il se mettait Laurent à dos. S’il allait dans le sens de Laurent, il brisait Carl. Et le rapport de force penchait clairement du côté de Laurent. La logique voulait qu’il suive la volonté du père.</p><p>(Mais il en resterait une cicatrice. Si la confiance de Carl se change en haine, mon erreur laissera une blessure profonde, et m’emportera avec elle…)</p><p>William avait déjà commis une faute : il s’était laissé toucher par Carl. Aujourd’hui il se disait que cela lui était égal, mais trahi, il changerait. Plus la confiance est grande, plus la colère est violente.</p><p>(Si Laurent voulait vraiment l’en écarter, il n’aurait pas besoin de mon avis. On peut y voir un simple caprice, mais c’est aussi un avertissement. Et ça, je n’aime pas.)</p><p>William jeta un coup d’œil à Carl. Celui-ci baissait la tête, les lèvres mordues, les poings serrés, le visage marqué de tristesse. Il savait qu’il n’avait aucun génie. Il le savait, depuis son entrée sur le champ de bataille—</p><p>William inspira discrètement, comme pour confirmer son choix.</p><p>« Carl est… »</p><p>Carl sursauta, crispé. Laurent attendit la suite.</p><p>William—</p><p>« Carl, non… Carl m’est nécessaire. »</p><p>Il s’était décidé. Il se rangeait du côté de Carl.</p><p>« Quand j’ignorais encore qu’il était de naissance noble, j’ai failli l’abandonner. Sur le champ de bataille, je n’avais pas le loisir de réfléchir, et mes camarades alentour étaient en danger. Je me suis dit que je ne pouvais pas me consacrer à sauver Carl seul. J’ai détourné les yeux, ne fût-ce qu’un instant. Même si je suis revenu l’aider, le fait demeure : j’ai hésité, j’ai voulu l’abandonner. »</p><p>Sa confession brutale fit écarquiller les yeux d’Einhart, de Rutgard, et même de Laurent.</p><p>« Malgré cela, Carl m’a appelé son ami. Il a pardonné ce fou que je suis, cet étranger, citoyen de troisième rang. Pour moi, Carl est un ami irremplaçable. Il est le premier, dans ce pays, à m’avoir offert cela. »</p><p>À ces mots passionnés, le plus surpris fut Carl lui-même. William poursuivit sans lui laisser le temps de réfléchir.</p><p>« Certes, Carl n’a peut-être pas le talent d’un guerrier. Mais il a autre chose. Il a le don d’attirer les gens, de les entraîner, d’inspirer confiance. Ce pouvoir-là, même s’il ne sert pas un simple soldat, deviendra immense s’il se tient à la tête des hommes. C’est pour cela que j’ai besoin de Carl. »</p><p>William venait de prendre position. Il ignorait si c’était la bonne voie. Peut-être aurait-il fallu se ranger plus franchement à Carl, ou au contraire à Laurent, ou exploser bien plus tôt. Mais ce n’était plus le moment de se défiler. Laurent von Taylor n’était pas un homme qui pardonnait les faux-fuyants.</p><p>« Mais tout cela n’a pas de sens s’il meurt comme simple soldat. »</p><p>Les mots de Laurent glacèrent William.</p><p>« Je le protégerai. Quoi qu’il arrive, pour ma patrie, et surtout pour cette amitié, je le protégerai. »</p><p>À ce stade, il était prêt à mourir pour Carl. Il pouvait toujours quitter la demeure si les choses tournaient mal, fuir par la porte d’où il était entré. Il avait en tête le chemin hors du pays. En cas de pire scénario, il fuirait. Même si ce n’était pas glorieux.</p><p>« Père ! »</p><p>La voix de Carl résonna. Laurent détourna enfin ses yeux froids de William pour se tourner vers son fils.</p><p>« Quoi donc ? »</p><p>Carl n’avait presque jamais contredit ses parents. Et jamais il n’avait subi un regard aussi glacé de son père. Pourtant—</p><p>« Oui, je suis faible aujourd’hui. On a vu la réalité du champ de bataille. Je suis faible, c’est un fait. Mais avec William, j’ai l’impression que je peux devenir fort. Je veux devenir plus fort, me tenir à ses côtés. Puisque nous sommes proches, je veux être digne de marcher à ses côtés. Je ne peux pas tout abandonner maintenant ! »</p><p>C’était la première fois que Carl s’opposait à son père. Rien à voir avec un enfant gâté réclamant un caprice. Une révolte sérieuse. Einhart les observait, surpris par ce lien insoupçonné chez le Carl habituel.</p><p>« …Hm. C’est bien ce que je pensais. J’étais sérieux, tu sais. »</p><p>Le vent changea. Le regard froid se dissipa, balayé comme s’il n’avait jamais existé. Laurent était redevenu lui-même.</p><p>« Très bien, faites comme bon vous semble. William, excuse-moi de t’avoir mêlé à nos histoires de famille. Mais je suis content de ce que j’ai entendu. Merci d’être l’ami de Carl. »</p><p>Carl tourna vers William un visage rayonnant. William, gêné, détourna le sien, ce qui rendit Carl encore plus heureux.</p><p>« Pense simplement un peu aux affaires de la maison. Il y a beaucoup d’employés qui comptent sur nous. Ne te perds pas en chemin, Carl. Et surtout, ne va pas mourir. Tu peux faire ça ? »</p><p>« Oui, père ! »</p><p>Satisfait par la réponse, Laurent parcourut la tablée du regard.</p><p>« Bon, vraiment, désolé pour tout ça. Reprenons le repas. S’il refroidit, on dira encore que c’est ma faute. »</p><p>Lorsque Laurent frappa des mains, le dîner reprit, quoique avec un certain flottement.</p><p>L’atmosphère lourde ne se dissipa pas totalement, et William ne retrouva pas davantage le goût des mets.</p><p>○</p><p>« Tu utiliseras cette chambre. »</p><p>À la nuit tombée, guidé par Carl, William se retrouva devant une chambre d’angle au deuxième étage.</p><p>« Merci, Carl. »</p><p>William lui tendit la main. Carl la serra avec joie.</p><p>« Ne t’en fais pas, William. »</p><p>L’amitié entre les deux fut scellée. D’autres se seraient inclinés devant la volonté du chef de famille. Carl lui-même, en tant que second fils, aurait dû se taire. Justement parce que c’était impossible, leur lien se transforma en conviction partagée.</p><p>« À demain. »</p><p>« À demain. »</p><p>Ils se serrèrent les mains avec force, puis les relâchèrent lentement. Tous deux restèrent un instant à contempler l’endroit où leurs mains s’étaient jointes. Saisissant la situation, Carl détourna les yeux, soudain nerveux ; William aussi, embarrassé.</p><p>« Bonne nuit, William. »</p><p>« Bonne nuit, Carl. »</p><p>Ils se séparèrent. Carl agita la main en se retournant plusieurs fois.</p><p>Agitant paresseusement la sienne en retour, William entra dans la chambre qu’on lui avait attribuée.</p><p>Derrière la porte, William—</p><p>« Pfiou… »</p><p>expira profondément.</p><p>« Bordel… »</p><p>La sueur séchée lui donnait une sensation poisseuse dans le dos.</p><p>« La chambre d’à côté est inutilisée. C’est une pièce d’angle, donc rien à craindre. Ça ira. Oui, ça ira… »</p><p>Éreinté, William affichait un visage las qu’il ne montrait jamais en public. Il se laissa tomber à la renverse sur le lit.</p><p>« Je suis plus exténué qu’après une bataille. »</p><p>Même ses jurons manquaient de mordant.</p><p>« Les nobles… sont vraiment tous des salopards. »</p><p>William se remémora l’échange sous le regard perçant de Laurent. Avec le recul, tout semblait avoir été conçu comme une pierre de touche pour l’évaluer. Les enjeux n’étaient plus les mêmes. Les acteurs non plus.</p><p>« Ce baron… il n’est pas du tout du même niveau. »</p><p>Il sentait clairement la différence.</p><p>« …Hm ? »</p><p>L’escalier était un peu éloigné, mais il entendit des pas. On approchait. Les pas s’arrêtèrent devant sa porte.</p><p>« … »</p><p>William se redressa et posa la main sur la poignée.</p><p>« Inutile d’ouvrir, William. »</p><p>La voix appartenait à Laurent. La tension monta d’un cran.</p><p>« Tu es très malin. Tu as soigneusement pesé tes mots et tes gestes, choisi la meilleure option à chaque instant, depuis bien avant que nous nous asseyions. Très malin. Peut-être trop. »</p><p>William resta coi. Qui se tenait derrière la porte ? Ce n’était pas un homme de la même trempe que ceux qu’il avait affrontés jusqu’ici.</p><p>« Je ne sais pas ce qui t’a amené dans ce pays. J’ai entendu ton excuse au début du repas, mais je ne suis pas assez naïf pour la prendre pour argent comptant. Réfléchis : si tu es fort et intelligent, tu n’as pas besoin d’aller dans un autre pays en tant qu’étranger, ni d’y courir des risques absurdes pour te faire un nom. Personne n’est forcé de choisir une voie aussi incertaine. »</p><p>Un frisson glacé parcourut la peau de William. Il retrouva la sensation qu’il avait eue face à Kyle, sur le champ de bataille.</p><p>« Donc je ne crois pas ton histoire. »</p><p>William en oublia de respirer, rivé à la porte.</p><p>« Mais je reconnais tes qualités. Tant que tu resteras l’ami de Carl, je pense que nous pourrons très bien nous entendre, toi et moi. »</p><p>William serra les dents. Tout avait été percé à jour. L’épreuve d’avant, tout son sens—</p><p>« Reste l’ami de Carl. Ce garçon est trop doux, trop pur. J’aimerais que tu ne trahisses pas cela. Je n’ai aucune envie de faire de toi mon ennemi. »</p><p>L’homme en face était trop dangereux. William n’avait pas les moyens de le contrer. Il n’avait réussi qu’à protéger le mensonge nommé « William ». Le reste avait été mis à nu.</p><p>« C’était cruel de te faire subir les histoires d’un vieil oncle. Tu dois être fatigué. »</p><p>La présence s’éloigna de la porte.</p><p>William se laissa retomber sur le lit.</p><p>« Bon sang… je ne fais pas le poids. »</p><p>Son visage était épuisé, mais un sourire effleura ses lèvres.</p><p>« Impressionnant, Lord Taylor. »</p><p>William avait avancé prudemment, pas à pas. Visiblement, cela avait amusé Laurent. Sa prudence avait dû lui paraître d’autant plus intéressante.</p><p>(Et toute cette mise en scène avec Carl n’était pas dénuée de sens non plus. Enfin, pour Carl, du moins.)</p><p>Cette question au sujet de Carl était destinée à lui arracher une réponse. Il avait gagné la confiance de Carl, mais comment cela apparaissait-il aux yeux de Laurent ? Néanmoins—</p><p>(En somme, tant que je garde Carl à mes côtés, la maison Taylor me considère comme un allié possible. Il ne s’intéressait pas à ma petite comédie, il voulait juste entendre cet engagement pour garder Carl.)</p><p>La guerre aussi est une parure pour les nobles. Si leur fils s’y distingue, les regards changent. William ignorait ce que Laurent avait exactement en tête, mais ils avaient, l’un comme l’autre, de quoi y gagner.</p><p>(Et pour moi aussi, les conditions sont bonnes. On ne me poursuivra pas pour avoir abandonné un camarade, et je profite du parapluie d’un noble malgré mon statut d’étranger. Autant en tirer parti.)</p><p>La raison première pour laquelle il avait choisi Carl était que celui-ci possédait ce qui lui manquait. Ce n’était pas un mensonge : il avait besoin de Carl pour compenser, aux côtés des techniques apprises à Laconia, ce que William ne pourrait jamais obtenir seul. Inversement, Laurent avait probablement compris que ce n’était pas une feinte. Ils croyaient l’un en l’autre parce que leurs intérêts convergeaient. Rien de plus.</p><p>(Aujourd’hui, j’ai perdu, battu à plate couture. Mais un jour, je gagnerai.)</p><p>William tendit la main vers le plafond.</p><p>D’abord, atteindre ce plafond-ci. Ensuite, viser le ciel.</p>

Revision Notes

Correction systématique des formulations lourdes ou approximatives pour une meilleure fluidité tout en conservant le ton narratif de light novel. Clarification de certaines répliques ambiguës pour mieux refléter l’intention implicite (tests de Laurent, position de William, perception de Rutgard). Uniformisation des marques de dialogue (guillemets français, tirets cadratins évités ici pour rester cohérent avec le format source). Maintien rigoureux des balises HTML et de la structure en paragraphes telle que fournie. Ajustements lexicaux pour cohérence terminologique : conservation des toponymes (Arcadia, Lusitania, etc.), maintien de 'Carl' au lieu de 'Curl', respect du registre (insultes, niveau de langue de William). Allègement de certaines redondances tout en préservant les informations et le rythme de la scène. Correction de petites incohérences logiques ou de pronom (clarification des sujets dans certaines phrases de Laurent et William). Adjust Carl’s aside to preserve the apologetic nuance: change «(J’ai été forcé de choisir, tant pis.)» to something like «(J’ai été forcé de trancher, désolé.)» or «(On m’a forcé à décider, désolé.)». Restore a bit more of the original edge where toned down without need: e.g. «Les nobles… sont vraiment tous des salopards.» is strong and good, but «Même si ce n’était pas glorieux.» for «It is good if it becomes the worst excrement.» could be made rougher: «Même si je dois finir dans la merde.» to better match William’s crude self-talk, if consistent with the novel’s register. For «Le repas s’ouvrit dans un frémissement de mouvements.» consider a slightly plus sonore phrasing to reflect bustle: «Le repas s’ouvrit dans un bruissement animé de pas et de va-et-vient.» Where the source implies a cheap/contrived performance («three-elemented play»), strengthen the nuance: «Et toute cette petite comédie montée autour de Carl n’était pas dénuée de sens non plus.» instead of the more neutre «mise en scène». Clarify the sentence on Laurent’s rank while keeping nuance: instead of «Ce baron… il n’est pas du tout du même niveau.», something like «Ce baron… ce n’est pas du tout la même catégorie.» or, if the original JP specifies a rank (cinquième place), reflect it if known from canon. Ensure consistent treatment of names in line with the source material (Livius vs Liwius, Rutgard vs Ruthgardo) based on official transliteration for the series. Smooth a few minor heavinesses without altering meaning, e.g. «Il en était complètement épuisé nerveusement.» → «Cela le vidait complètement, nerveusement.» Consider reinstating certain literal markers of danger and calculation to keep William’s paranoia vivid (e.g. emphasise the idea of 'mort accidentelle' et des voies de fuite dans une tournure un peu plus brute, sans trop polir).